Le tour des 10 Lacs en Hog's Back par Clover

La photographe et cycliste de bikepacking Clover Fedoriuk-Russel a pris son Hog's Back pour faire le tour du parcours Powell River 10 Lakes, et nous a décrit son voyage, son trajet, et son nouveau vélo!

J'ai surtout eu, toute ma vie, des vélos de route à moitié ferraille, juste bons pour se promener un peu en ville. Ça a pris mon déménagement d'un village de surf tranquille vers la montagne pour que je me lance vraiment dans la belle vie sur deux roues. Par intérêt autant que par nécessité de trouver une activité autre que le surf, les vélos sont devenus une nouvelle identité dernièrement. Après avoir eu un vélo de gravier d'entrée de gamme, j'ai décidé de prendre ça au sérieux et j'ai commencé mes recherches pour m'en monter moi-même un vrai. Je cherchais de quoi avec un look classique, mais moderne. Qui vibre sans détonner. Je voulais le style d'un vélo de route classique, mais avec la facilité de trouver des pièces fonctionnelles modernes, qui m'accompagneraient partout et seraient à la hauteur d'aventures hors-piste. Après des heures voire des mois de recherche, j'ai enfin trouvé mon Hog's Back. Elle était là avec ses 54cm et ses décals oranges, à m'attendre dans toute sa couleur Fauve Sablé. J'ai donc lancé mon montage! Ça va sans dire que c'est un plaisir de bâtir un vélo. Les petits ajustements, mécaniques comme esthétiques, se sont avérés la partie la plus frustrante mais au final satisfaisante. Et après quelques jours à tout défaire et refaire, ma monture de rêve était prête et c'était rendu temps de planifier des voyages.

J'ai grandi sur la côte de la Colombie Britannique, toujours en train de filer d'une ville à l'autre en voiture et de tenter d'échapper à la saison touristique chaotique. Bien que j'aie passé du temps dans les petites villes maritimes et sur les îles qui les séparent, je n'avais jamais pris le temps de ralentir pour bien explorer les racoins qui m'étaient pourtant si familiers de la côte Ouest. Qathet (alias Powell River) était jadis une escale, mais beaucoup de ma famille y habite maintenant et ça m'encourage à passer du temps dans cette région isolée. C'est seulement quand j'ai commencé à faire du cyclisme sérieusement que j'ai pu vraiment voir Qathet et les autres régions côtières comme elles le méritent: avec deux jambes et le coeur qui bat.

Le Powell River 10-Lakes Overnighter (lien en Anglais) est une boucle d'une à deux nuits sur un chemin de foresterie poussiéreux qui va autour des montagnes Smith et du mont Tin Hat. C'est aussi encore un chemin de foresterie en service, avec points d'appel, camions à bois, et traffic de touristes. Comme bien des gens avec un souci de l'environnement, je crois que les chemins d'accès forestiers et les sites aménagés occupent une place contradictoire pour le loisir en plein air, puisque les sites de loisir éloignés et isolés sur de superbes lacs, loins de la vie de tous les jours, nous permettent d'apprécier sereinement la nature, mais ce n'est possible d'y accéder que par les chemins dans la friche. On ne peut qu'être entouré de la longue histoire controversée de l'industrie forestière en Colombie Britannique, mais c'est un sujet à discuter une autre fois.

Qathet est une ville historiquement ouvrière qui donne l'impression d'être figée dans le temps. Elle est blottie dans le milieu du District Régional Qathet sur la côte Ouest, avec des couchers de soleil et des belles petites maisons qui valent bien la difficulté d'accès, puisque Qathet est entourée d'eau sur trois côtés, alors peu importe d'où vous partez c'est pas commode d'y aller. On a par contre l'avantage d'une culture artistique bien calme, qui vient de la distance des pôles urbains. Qathet a une communauté punk underground, plein d'appréciation pour les sports de plein air, sans parler des meilleurs samosas que j'ai mangée de ma vie. Et quand on y pense n'est-ce pas ce qu'on recherche dans le bikepacking? S'évader du stress urbain et trouver la meilleure bouffe!

Le 10 Lakes Overnighter nous fait prendre un chemin de foresterie qui touche à toute une série de lacs, et en grimpant et descendant la route poussiéreuse on a plein de choix de places pour se saucer d'une chaude journée d'été. On est partis du centre de Qathet et avons rejoint le chemin après Duck Lake. La route était assez roulante, et par chance la surface avait été dressée la semaine d'avant, ce qui a rendu plus agréables mes pneus de 700x40C, qui ont quand même assez bonne tenue de route pour bien filer sur les descentes rocheuses. On planifiait faire le trajet sur deux nuits, mais la belle surface et les collations nous ont aidé à dévorer la boucle de 100km. En sens antihoraire la première partie n'est pas trop intéressante, et la route large n'offre pas de protection du soleil quand il fait 35 degrés. Après quatre heures à rouler au plus chaud de l'après-midi nous avons choisi la prochaine halte, Nanton Lake, comme première pause baignade.

Nanton Lake est un petit lac plein d'oies, entouré de souches d'arbres anciens qui lui donnent l'air d'un cimetière pachyderme. On a quand même trouvé une jolie place à piqueniquer et avons apprécié la chance de se rafraîchir près des fleurs sauvages qui bourdonnaient d'abeilles. Après avoir vérifié le parcours, nous avons décidé que Dodd Lake serait notre destination pour terminer la journée. La virée Powell Lakes Loop a tellement de places où on peut piquer dans les bois pour camper que nous n'avions pas de plan fixe pour notre horaire avant de partir à l'aventure. Le but du voyage était de tester l'équipement, se débrancher du monde, et prendre un café au bord d'un lac.

Après quelques heures supplémentaires sur la route, nous sommes arrivés à Dodd Lake juste à temps pour une baignade du soir. Grâce à des voisins sympathiques, nous avons pu camper à un de mes emplacements préférés à date. Bien placés entre les arbres et le lac, nous avons pu oublier la longue route chaude que certains pourraient considérer "type two fun". Après qu'on aie déchargé nos vélos et piqués notre tente, nous avons fait une petite tournée du camping. Nous sommes tombés sur des habitants de Powell River qui nous avaient dépassés en voiture quelques heures plus tôt, avec une mine qui disait "Mais ils font quoi voyons ces deux-là?". Ils avaient leur tente-remorque de 35pi pour prendre le meilleur site possible en vue de la fin de semaine de camping, et quand je leur ai dit qu'on avait pédalé "juste du centre-ville," ils ont rigolé et de toute évidence nous trouvaient un peu fous. Il faut dire qu'ils nous ont quand même offerts une bière froide et nous sommes partis explorer un petit sentier le long du lac qu'il ne fallait pas manquer.

Le Powell River 10 Lakes Loop a aussi un parcours de canot bien fréquenté qui fait le tour des lacs. Il y a quelques sections de portage où les lacs ne communiquent pas, et c'est un de ces sentiers de portage qu'on a suivis au coucher du soleil jusqu'à Ireland Lake. Je crois que c'était la plus belle section de vélo de la journée! Au retour, nous avons essayé en vain de trouver une cache à ours, pour finalement bourrer un de nos sacs de guidon HMPL de notre bouffe et l'attacher au bout d'une corde sur la plus haute branche qu'on a pu trouver.

Après une nuit paisible avec comme seule lumière la Lune, loin de tout service cellulaire et de la vraie vie, et avec le son des abeilles et de la mémorable Grive de Swainson pour accueillir l'aurore, nous avons pris notre temps avec nos cafés et avons rangé notre camp pour de partir avant que le jour commence vraiment à taper. Après un moment sur la route nous avons aperçu un autre sentier de portage, et bien écoeurés du grand chemin poussiéreux avec ses camions forestiers, nous avons lancé le dé avec l'espoir de trouver un sentier aussi agréable que celui d'hier soir. Après quelques virages secs et de grosses racines, j'ai eu pitié des pauvres campeurs qui nous ont croisés avec leurs canots sur les épaules, à suer sur les montées et descentes et à éviter les souches et les bûches emmoussées. La prévisibilité du grand chemin de gravier a aussi commencé à me manquer, mais j'étais heureuse d'avoir un peu de protection de la chaleur déjà intense.

À la sortie du sentier étroit, à pic et forcément lent, on a ressenti un désir pour de la vitesse et on a accéléré sur la route pour rattraper le temps perdu. En commençant à forcer, j'ai été impressionnée comment le vélo pourtant chargé était capable de naviguer les nids de poule et le gros gravier du chemin de foresterie. Quelques lacs plus tard et après une petite descente, nous avons trouvé une cabane cachée avec l'agréable nom de "Pog's Place", discrète et en retrait du chemin. Ça nous a fait plaisir de s'asseoir sur le quai et grignoter des pommes et du fromage autant qu'en voulaient nos corps.

Après quelques heures, avec le soleil à son zénith, nous avons cru bon rentrer à la maison. Un arrêt au prochain ruisseau pour de l'eau et nous étions lancés pour le reste de l'après-midi, avec la dernière grosse montée dans la tête. Je ne pouvais qu'obséder sur mon GPS pour estimer la difficulté de la côte et essayer de me convaincre de ne pas la monter à pied. Deux choses m'ont aidé: le GPS c'est nul pour l'élévation et j'espérais donc que son erreur soit en ma faveur; et on avait comme objectif de la Crème Glacée comme récompense! Avec un 15km qui restait sur nos 100km, c'était quand même bon d'être de nouveau sur de l'asphalte. La sortie fut, somme toute, courte et bonne, et après avoir testé mon Hog's Back sur un terrain typique de la Colombie Britannique côtière, je peux maintenant affirmer que mon vélo de rêve peut affronter la poussière et la chaleur, en restant cute au boutte quand la destination est une crème glacée bien méritée à la fin de deux grosses journées.

Clover a suivie le parcours recherché et publié par Natalie Jones et Bikepacking.com

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